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Orange « Salarié unique », reconnu ou à la tête du client ?

La Direction d’Orange communique à travers son nouveau DRH, Jérôme Barré, sur son objectif de « faire vivre à chaque salarié une expérience unique », en relation avec l’objectif de « faire vivre à chaque client une expérience unique ». L’intention peut s’avérer louable. Encore faut-il voir ce qu’elle signifie.

Pour préciser les choses, la Direction annonce que « les preuves viendront nourrir continûment sa promesse d’être un employeur digital et humain ». Dans son esprit, cela suppose de garantir une qualité de vie au travail qui se décline en trois engagements : garantir les compétences utiles pour demain, développer l’agilité collective et favoriser l’engagement de chacun.
Nous ne sommes pas certains que ce soit ce qui vient spontanément à l’esprit des salariés quand on évoque la qualité de vie au travail ! On pense plutôt aux moyens donnés par l’entreprise pour travailler dans de bonnes conditions :

  • un environnement agréable en termes d’espace de travail, de Système d’Information (SI) ou encore des relations avec la hiérarchie basée sur la confiance et le respect des droits ;
  • une charge de travail adaptée, une formation et des soutiens efficaces ;
  • enfin, la reconnaissance des efforts fournis en termes de rémunération et de déroulement de carrière.

Nous pouvons concéder que les engagements de l’entreprise pourraient néanmoins répondre à ces aspirations tout en venant en contrepartie de la contribution attendue de chacun au projet collectif et sachant que l’entreprise donne à chacun les moyens d’exercer son métier avec excellence et de se développer. Où le bât commence à blesser, c’est quand la Direction précise que chacun est acteur de son propre développement ! Voilà qui rend les salariés responsables d’une situation qu’ils ne maîtrisent pas nécessairement : avec quels vecteurs, quels moyens, quels supports, sur quels temps ? Le ressenti actuel, c’est plutôt la débrouille individuelle pour rester à niveau avec les nouveaux outils digitaux, les réorganisations et les produits émergents.
Mais surtout, en termes d’engagements de l’entreprise, on reste dans un magnifique flou artistique ! Que signifie concrètement « repenser les modes de travail » ? Comment l’entreprise compte-t-elle « développer l’autonomie » et « favoriser la coopération et l’entraide dans un environnement de travail de qualité » ? Que valent ces objectifs en regard des 3 milliards de baisse de coûts dans les 3 ans contenus dans Essentiels2020 ?
Le manque de personnel et la systématisation des open-spaces pour optimiser les surfaces font mauvais ménage avec qualité de vie au travail ! Et comment « prendre en compte la situation et l’histoire de chaque salarié », sans revoir en profondeur le positionnement de chacun, positionnement qui n’a pas été revu depuis la reclassification en 1995 ?
Et si l’intention de la Direction de prendre en compte la voix de chaque salarié en favorisant l’expression de chacun est tout à fait louable, quelle place donnera-t-elle à l’avenir aux instances représentatives du personnel et aux organisations syndicales ?
L’individualisation du rapport entre les salariés et l’entreprise présente, à nos yeux, de nombreux risques que nous voulons éviter. FOCom privilégie les droits collectifs par souci de justice et de transparence, deux sujets qui restent par ailleurs des points très chahutés dans le baromètre social. C’est pourquoi nous sommes, d’une manière générale, réticents à tout système qui s’écarte des repères collectifs, que ce soit pour la reconnaissance des compétences, des qualifications ou la gestion des carrières.
Le salarié est certes unique dans sa personnalité mais tous doivent rester égaux dans leurs droits et les opportunités qui leur sont offertes. La mise en concurrence des salariés entre eux est néfaste et contre-productive par rapport à l’objectif affiché par Orange de promouvoir le travail et le management collaboratifs. L’individualisation, déjà forte dans l’entreprise à travers les systèmes de rémunération et de promotion, a renforcé une certaine opacité du système. Dans le domaine des augmentations individuelles, des Parts Variables commerciales et managériales, de la promotion ou des Mesures Emploi et Compétence, les critères d’attribution sont fondés d’une part sur la performance individuelle, sur la réalisation d’objectifs définis et d’autre part sur les priorités de politiques qui visent à développer certains secteurs d’activité ou encore certains comportements. Il existe un lien entre ce système de reconnaissance et la persistance de pratiques arbitraires.
Chacun devrait être traité sur un pied d’égalité, avec les mêmes critères, même dans le cadre de mesures individuelles, mais les faits sont têtus : des budgets de promotion n’ont pas été consommés sans explication sérieuse, des mesures emploi et compétences ont été attribuées sans application des critères prévus, de nombreux managers n’ont disposé d’aucune influence réelle sur les augmentations de leur équipe, les décisions étant prises à d’autres niveaux, souvent hors de toute connaissance du terrain et de la réalité du travail (or pour reconnaître il faut déjà… connaître). Paradoxalement, pour trouver des solutions « individualisées », les RH de proximité sont souvent démunis et ne disposent pas de marges d’action suffisantes. Et faire porter la responsabilité d’une défaillance collective sur l’individu est le signe d’une déresponsabilisation de l’entreprise vis-à-vis de ses salariés.
Il est à rappeler qu’au titre du plan de formation, l’employeur est tenu d’assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail, mais aussi de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi, conformément à l’article L6321-1 du Code du travail.
Le salarié unique ne doit pas remettre en cause les socles de référence solides que sont la formation, la classification, la grille de rémunération et les garanties statutaires. Le salarié unique ne doit pas non plus, sous couvert de solidarité, être source de conflits entre les femmes et les hommes au sein de l’entreprise. Au vu de toutes les réorganisations du travail actuelles et à venir chez Orange, à l’instar de ce qu’a connu le personnel de l’Agence Entreprise dans le cadre du projet « Delivery », la part de reconnaissance doit être avant tout collective.

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