Le gouvernement a tranché : le prix de réserve pour l’attribution des fréquences 5G a été arrêté à 2,17 milliards. Les opérateurs devront débourser 350 millions pour obtenir le premier bloc de fréquences de 50 MHz. Les 110MHz de spectre restants seront disputés lors des enchères sur des blocs de 10 MHz mis aux enchères entre février et avril.
FOCom regrette que le gouvernement ait préféré faire les poches des opérateurs pour boucler le budget 2020 de l’Etat plutôt que de leur laisser les moyens d’assurer les investissements colossaux qu’ils doivent réaliser pour équiper le pays. Les besoins se chiffrent à 10 milliards par an rien que pour la 4G et la fibre dans des conditions difficiles avec des prix d’abonnement les plus bas d’Europe et une fiscalité excessive. Cette décision n’est pas cohérente avec ce qu’avait annoncé le gouvernement au printemps dernier lorsqu’il promettait que le plancher serait plus proche de « 1,5 milliard que de 3 milliards ».
Et il faut bien dire que les atermoiements de l’ARCEP pour tenter de privilégier certains opérateurs « alternatifs » ont eu un impact négatif sur le calendrier qui a fait correspondre la décision à la dernière ligne droite du bouclage budgétaire.
Thierry Breton à la commission européenne ?
La presse annonce que le Président de la République pourrait proposer Thierry Breton comme commissaire européen. Après le camouflet du rejet de Sylvie Goulard par le parlement de Strasbourg, Emmanuel Macron prendrait le risque, si cela se confirmait, de proposer à nouveau une personnalité éminemment discutable. Si la presse évoque les potentiels conflits d’intérêt, du fait de la position de Thierry Breton dans le monde économique, nous avons surtout en mémoire son passage à la tête de France Télécom au début des année 2000, après Michel Bon et avant Didier Lombard. Et son mandat fut loin d’être anodin. S’appuyant sur la nécessité de redresser les comptes de l’entreprise très endettée, il a mis en place un management d’une très grande brutalité, prolongé par son successeur, et qui est largement responsable de la crise sociale des années 20005-2010. Son parcours dans d’autres entreprises, après sa brève carrière gouvernementale, confirme malheureusement la nature de ses méthodes. Le procès des suicides à France Télécom, qui s’est tenu cet été et dont nous attendons le verdict en fin d’année, n’a pas permis de faire comparaître Thierry Breton car il n’était plus à la tête du Groupe durant la période examinée par la justice. Il n’en demeure pas moins que sa nomination à la commission européenne serait un mauvais signal quant aux intentions « sociales » du Président de la République.
FTTH : la Cour d’appel confirme une décision de l’Arcep en faveur de Free et contre Orange
La Cour d’appel de Paris a confirmé intégralement les décisions de l’Arcep prises en faveur de Free en juin 2018 et contre laquelle Orange avait fait un recours en annulation en contestant sa légalité.
Cela concerne 3 aspects qui vont donner un énorme avantage à l’entreprise de M. Niel :
– La durée des droits d’usage accordés à Free par Orange en contrepartie de son cofinancement et d’une solidarité sur les coûts d’entretien du réseau sera d’au moins 40 ans contre 20 ans précédemment.
– Orange devra proposer à Free “un avenant à son contrat d’accès prévoyant la définition de manière explicite et transparente des liens entre les principaux tarifs du contrat et les coûts du réseau cofinancé ainsi que la transmission des grandes masses des dépenses d’investissement et d’exploitation du réseau déployé par Orange en zone AMII, de façon agrégée et dans un calendrier adéquat ».
– Free pourra utiliser les fibres surnuméraires disponibles sur le réseau FttH d’Orange pour raccorder des stations de base mobile de Free Mobile. Free pourra se raccorder au réseau 4G et demain 5G d’Orange… sans avoir à investir !
Autant de nouveaux coups honteux contre l’opérateur historique dont le PDG vient pourtant de faire un geste d’apaisement envers les autorités en retirant la question prioritaire de constitutionnalité qu’il avait déposée mi-septembre contre le régulateur visant à contester son objectivité et son pouvoir de sanction.
Le Très Haut Débit malgré l’ARCEP
Le déploiement de la fibre en France est probablement le chantier industriel le plus massif depuis des décennies. Environ 40 à 50 milliards d’euros investis, des dizaines de millions de foyers raccordés en cinq ou six ans. Le tout assuré à plus de 70% par Orange à un rythme actuel de plus de 10 000 prises par jour. Nous aurions pu avoir davantage de soutien du régulateur dans ce défi hors du commun. En effet, si les récentes tensions entre Orange et l’ARCEP semblent apaisées, on constate quand même que les menaces de sanction pour des soi-disant retards de déploiement sont ciblées sur Orange alors que d’autres acteurs qui ont également des obligations et bien plus de difficultés (SFR par exemple) ne sont pas inquiétés. A FOCom, nous avons toujours dit que le plan « France Très Haut Débit » élaboré par l’actuel président de l’ARCEP était un handicap pour le pays avec son système de RIP balkanisés. La responsabilité du régulateur est maintenant d’aider l’opérateur héritier du service public à terminer ce chantier dans les meilleures conditions.
Le plan Très haut Débit freiné par le manque de techniciens
Tous les opérateurs, Orange compris, sont aujourd’hui limités dans leur capacité de déploiement des réseaux par le manque de compétences disponibles pour réaliser les chantiers. Cette situation avait été identifiée il y a déjà de nombreuses années. Le comité stratégique de la filière numérique auquel FOCom a participé avait dressé ce constat dès 2012-2013. France Stratégie avait également mis en évidence la question et les solutions possibles en 2016 à travers un projet, où Focom était contributeur, intitulé « Vision Prospective Partagée des Emplois et des Compétences de la filière du numérique ». Il n’y a donc là rien de nouveau mais les mesures nécessaires n’ont jamais été prises par des gouvernements plus occupés à faire du consumérisme électoral que des politiques industrielles et tournées vers l’emploi. Dans le cadre du pacte productif mis en place par le gouvernement actuel, le groupe de travail sur le numérique présidé par le secrétaire d’état Cédric O et auquel FOCom participe également, a fait le même constat. Des mesures doivent être annoncées courant octobre et nous espérons qu’elles seront enfin sérieuses. En tout état de cause, ce sont des dizaines de milliers de postes nécessaires qui ne pourront pas être comblés à brève échéance. FOCom a proposé, à plusieurs reprises et depuis des années, à la direction d’Orange de créer une filière propre de formation et de recrutement dans les métiers techniques. Cela aurait été tout à fait possible et aurait pu régler en même temps le faible taux de féminisation de ces métiers. Nous n’avons pas été écoutés au motif qu’après le déploiement actuel des réseaux, l’entreprise ne saurait pas quoi faire de ces techniciens. N’y aura-t-il donc plus de rupture technologique et d’autres techniques à déployer ? Nous payons aujourd’hui cette vision court-termiste et malthusienne. Et si rien n’est fait pour redresser la barre, nous le paierons plus cher à l’avenir.