Parmi les mesures négatives de la loi Macron il y a le renforcement de l’Autorité de la concurrence. Ce super gendarme est le relai en France de la politique de concurrence de la commission européenne et de sa vision exclusivement consumériste. La multiplication des opérateurs en Europe et l’arrivée du 4ème opérateur en France, la guerre entretenue entre eux ont, certes, fait baisser les prix mais au détriment de l’investissement et l’emploi. Cette vision à court terme ne permet pas, par exemple, de déployer de façon satisfaisante et égalitaire le THD ce qui est préjudiciable aux citoyens. De plus cette politique fait la part belle aux géants américains ou chinois du numérique qui bénéficient de marchés internes protégés et disposent pour envahir nos marchés d’une redoutable force de frappe assortie d’une curieuse impunité, notamment fiscale.
Quel plan fibre veut-on ?
Orange et Free dénoncent l’utilisation qu’ils jugent abusive, du mot «fibre» dans les offres du groupe SFR-Numericable. Ce dernier amène la fibre au pied des bâtiments (FTTB) et emprunte ensuite le câble coaxial de la TV pour se brancher chez l’abonné au lieu d’installer la fibre jusqu’au logement même (FTTH). Question distorsion de concurrence, on se rappelle que le cablo-opérateur a bénéficié d’une complète dérégulation pour déployer le câble.
Mais la vraie question, pour nous, n’est pas tant de savoir quelle est la réalité technique du câble des derniers 20 mètres. La vraie question est quelle politique nationale de déploiement, de gestion et de régulation du « plan fibre » !
Veut-on, peut-on, laisser un service dont l’enjeu est l’équipement numérique de tous les citoyens, en totale et incontrôlée « délégation de service » ?
On a vu par le passé ce que cela a donné dans la gestion de l’eau dans les collectivités locales…
Télécoms : revenus toujours en berne
Entre 2010 et 2015 les revenus des opérateurs de télécom se sont repliés de 18%, selon Xerfi, dans un climat concurrentiel intensifié.
Les recettes perçues auprès du client final, qui représentent plus de 80% du chiffre d’affaires, ne cessent de chuter depuis l’arrivée de Free mobile en 2012. Les conséquences de l’arrivée du 4ème opérateur mobile se ressentent encore en 2014, avec une baisse de 10,4% du chiffre d’affaires de l’activité “service mobile”. Les investissements dans le secteur ont continué à ralentir en 2014.
Sans une inflexion, malheureusement très improbable, de la politique de concurrence exacerbée, il est à prévoir que les recettes totales des spécialistes des télécoms reculeront à nouveau en 2015 (-2,0% en valeur estime Xerfi) et ce même si les opérateurs se tournent de plus en plus vers les prestations à haute valeur ajoutée, dans le BtoC avec la vente de contenus, ou le BtoB (partage instantané de données, hébergement applicatif…). FOCom regrette que l’ARCEP, pour ne nommer qu’elle, persiste à considérer que “la concurrence, est un élément essentiel de la dynamique des télécoms, car elle est un facteur de compétitivité.” (Sébastien Soriano le 13/01/2015, Commission des affaires économiques de l’Assemblée Nationale).
L’ARCEP enfin utile ?
À l’occasion de sa prise de fonction, le nouveau président de l’ARCEP (gendarme des télécoms), Sébastien Soriano, a déclaré vouloir être « dans une certaine empathie » avec les opérateurs. Cet état d’esprit est un changement positif par rapport à son prédécesseur. Mais ce qui a aussi attiré positivement notre attention, ce sont ses commentaires concernant « le rôle croissant des GAFA dans le fonctionnement d’Internet ». Il explique : « Aujourd’hui, la régulation a atteint un degré de sophistication exceptionnel pour les opérateurs télécoms au niveau européen. En face, des géants du net imposent sans aucun contrôle leurs propres règles, à travers des « policies » parfois très structurantes pour l’économie numérique. Cela n’est pas acceptable. Mon opinion personnelle est que la régulation des géants du net est devenue indispensable. » Ses actes seront-ils conformes à ses dires ?
La pomme décroche la palme
Record absolu : le bénéfice d’Apple s’élève à 18 milliards de dollars au 4ème trimestre 2014. Il s’agit du plus gros profit jamais engrangé par une entreprise. Pour donner un ordre d’idée ce bénéfice correspond à près du double du chiffre d’affaire consolidé d’Orange sur la même période. Ces résultats rendent d’autant plus scandaleuses les pratiques d’évitement fiscal de cette société. À tel point que les autorités américaines envisagent de taxer les profits stockés à l’étranger des multinationales qui ne rapatrient pas leurs bénéfices réalisés hors des Etats-Unis.
Les mesures de rétorsion contre les experts de la manipulation fiscale deviennent possibles au royaume du libéralisme. Et nous ne serions pas capables d’en prendre en Europe ? Ou, mieux encore, au niveau international ?