Sébastien Soriano, Président de l’Arcep depuis janvier 2015, va prendre la présidence du régulateur européen des télécoms, le BEREC. FOCom espère qu’il voudra prendre les mesures que nous attendons pour protéger le développement du numérique européen. Que ce soit sur la neutralité du net, le nouveau paquet télécom ou le marché unique du numérique, les décisions n’ont jusqu’alors guère épargné les opérateurs du vieux continent. Ils ont beaucoup souffert d’une dérégulation asymétrique et d’une politique consumériste qui font le lit des GAFA et autres prédateurs, transatlantiques notamment. Nous avons déjà eu l’occasion de dénoncer “l’optimisation fiscale” dont ils bénéficient et le fait qu’ils font leurs affaires sur nos marchés sans investir ni créer d’emplois. Et pendant ce temps la concurrence entre opérateurs européens pléthoriques est artificiellement exacerbée au nom des consommateurs mais surtout d’un dogme ultra libéral complètement suicidaire. La raison va-t-elle enfin prévaloir ?
Consolider sans casse !
Selon diverses rumeurs des négociations seraient de nouveau engagées entre Bouygues et Orange pour la cession de Bouygues Telecom voire. Payé en actions Orange le groupe Bouygues deviendrait le premier actionnaire de l’opérateur historique devant l’Etat. Orange récupérerait quelque 10 millions de clients ce qui ferait passer sa part de marché à 50%.
Emmanuel Macron a déclaré : “Quel que soit le projet qui pourrait être présenté, nous l’examinerons sur la base de principes clairs : la priorité à l’investissement, dans la fibre comme pour la couverture mobile et l’emploi”. En tout état de cause, pour la Fédération FOCom (qui couvre toutes les entreprises du secteur), s’il devait y avoir consolidation, elle ne devrait pas se faire aux dépens des salariés. Et les paroles du ministre de l’économie doivent être suivies d’actes.
Drahi dévore tout
Déjà propriétaire de Libération et de l’Express, Patrick Drahi vient de prendre le contrôle de la maison-mère de BFMTV et RMC avec Alain Weill, le fondateur de NextRadioTV. Après SFR acquis en avril 2014 pour 17,4 Mds €, Portugal Telecom, en décembre pour 7,4 Mds €, le câblo-opérateur américain Suddenlink en mai pour 8 Mds €, Drahi a racheté en septembre 2015 Cablevision pour 15,6 Mds €. La semaine passée, il a annoncé le rachat des droits de la Premier League, championnat anglais de football. En quelques années, l’homme d’affaires a réalisé sa fortune, la 3ème du pays, sur un endettement colossal, le paiement tardif de ses fournisseurs, “l’optimisation” fiscale, la réduction drastique des coûts et le dégraissage du personnel. Bref, tel l’ogre, en dévorant les autres… Sans trouver beaucoup d’obstacles à son appétit démesuré. Avec sa main-mise sur les médias, gageons que son influence politique va encore se renforcer et qu’il se trouvera de moins en moins d’esprits chagrins pour le critiquer dans la presse.
SFR épinglée par l’Arcep
L’ARCEP a publié son premier rapport sur l’effort d’investissement des opérateurs mobiles le 3 décembre. “Stables et importants” les investissements pour le déploiement des réseaux mobiles 2G, 3G et 4G s’élèvent à 2,2 Mds en 2014. Le rapport souligne néanmoins que pour les zones moins denses, le très haut débit sur mobile reste très loin de l’obligation de 40% de couverture des populations de ces zones d’ici le 17 janvier 2017. En juillet 2015, SFR et Bouygues Telecoms ne couvraient chacun qu’environ 1% de la population des zones peu denses tandis qu’Orange en était à 25%. SFR reçoit également un avertissement de l’ARCEP pour un taux de couverture 4G de 39% de la population (et 3% du territoire) seulement tandis qu’Orange couvre avec son propre réseau 4G 76% de la population, Bouygues Telecom 72% et Free Mobile 52%. Par ailleurs selon l’enquête de l’ARCEP sur la qualité de service, Orange a les meilleurs résultats, que ce soit pour les services de téléphonie, de SMS ou de données. Bouygues Telecom et SFR affichent des performances assez proches, moins bonnes que celles d’Orange, avec un léger avantage pour le premier. Free Mobile, dont le réseau 3G est en cours de déploiement et qui a recours à l’itinérance sur les réseaux 2G et 3G d’Orange, obtient des résultats sensiblement moins bons sur un grand nombre d’indicateurs.
Rien d’étonnant à ces résultats, ils correspondent aux efforts d’investissements respectifs des opérateurs. Ce qui montre l’absurdité de sanctionner ceux qui investissent le plus.
Signez la pétition : Cessez le pillage d’Orange !
Le lobby des RIP de nouveau à la manœuvre au Sénat
Le plan très haut débit qui vise à connecter l’ensemble du territoire français au très haut débit en 2022 a peu de chances d’être réalisé. Selon la Commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, seraient principalement en cause un “manque d’Etat” et la “stratégie discrétionnaire et fluctuante” des grands opérateurs. Pour y remédier, ils préconisent notamment d’obliger les opérateurs à exploiter les réseaux d’initiatives publiques des infrastructures construites par les localités pour être louées à un opérateur. C’est vraiment du grand n’importe quoi !
Si la couverture numérique du territoire est très insuffisante et inégalement répartie, nous le déplorons également. Mais à qui la faute ? Chacun a voulu son petit réseau pour assurer son petit potentat et s’est opposé à un réseau national techniquement cohérent, coordonné et planifié par l’Etat, s’appuyant sur l’existant en évitant doublon et sur dimensionnement. FOCom a dénoncé dès l’origine le choix inverse qui a été fait et qui amenait inéluctablement à la balkanisation et à la gabegie actuelles.