Secteur Télécoms

Quand les plateformes dictent leur loi

La société Deliveroo a fait parler d’elle cet été : la plateforme britannique qui coordonne la livraison à vélo de sushis, pizzas et autres mets exotiques a décidé unilatéralement qu’à partir de fin août 2017 tous ses coursiers ne seraient plus payés à l’heure mais à la commande, soit 5,75 euros à Paris et 5 euros en province.
Et on se souvient du conflit qui a opposé la société américaine Uber à ses chauffeurs lorsqu’en décembre 2016, la plateforme a voulu faire passer sa commission prélevée sur les courses de 20 à 25%.
Ces exemples montrent, s’il en est besoin, l’asymétrie qui pèse dans la relation entre les donneurs d’ordre et les travailleurs des plateformes. D’où la nécessité de les défendre et de les organiser comme tous salariés. Ce que leur propose FO afin de les aider à obtenir des droits protecteurs.

Les adeptes du « double irish » confortés

On le dénonce assez : les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) sont devenus experts en « optimisation fiscale » s’adonnant sans modération à ce que les fiscalistes appellent le «double irish». Qui n’a rien à voir avec une boisson festive. Il s’agit du procédé qui permet de faire remonter l’essentiel du chiffre d’affaires et des bénéfices dans des paradis fiscaux, par exemple en Irlande via les Bermudes.
Il faut dire que la législation fiscale prônée par l’OCDE favorise cet évitement fiscal. En effet une multinationale ne doit d’impôts dans un pays que sur ce qu’elle y produit et non sur les services qu’elle y vend. Cette pratique scandaleuse, qui défavorise les entreprises autochtones, semblait devoir être enrayée par les institutions européennes. Et, dans l’hexagone, Bercy commençait à dresser les ardoises fiscales. Il a ainsi réclamé 1,1 milliard d’euros à Google France. Mais le tribunal administratif l’a débouté et le gouvernement vient d’annoncer une possible transaction avec Google. Celà signifie l’annulation du redressement fiscal mais aussi la disqualification du jugement attendu pour «blanchiment de fraude fiscale». De surcroît c’est la porte ouverte à une fiscalité négociée, ce qui est proprement stupéfiant ! Vous vous voyez négocier à l’avance le montant de vos impôts ?

Pavlov, carotte et THD

Emmanuel Macron a promis lors de la Conférence nationale des territoires, une couverture de la France entière “en haut et très haut débit” d’ici “à la fin de l’année 2020”.  Pour ce faire, le directeur de l’Agence du numérique, Antoine Darodes, a indiqué 19 juillet, devant la commission de l’aménagement du territoire du Sénat que le gouvernement veut conclure une “sorte de contrat” avec les opérateurs de télécommunications qui « sont des organismes généralement rationnels, voire pavloviens parfois ». Il serait ainsi “relativement simple”, selon lui, d’arriver à un accord à condition qu’ils signalent « à quelle carotte ils sont prêts à répondre ».
Sans être pavloviens, nous estimons à FOCom que les opérateurs doivent être sécurisés quand ils s’engagent dans des plans d’investissement, la moindre des choses est qu’ils aient une réelle visibilité sur la réglementation, la régulation, la fiscalité et la marge de manœuvre dont ils disposent. Nous nous félicitons que le dogme du « tout fibre » ne soit plus de mise et que toutes les solutions technologiques soient mobilisées, Antoine Darodes citant « une meilleure mobilisation du réseau classique en cuivre, l’utilisation du satellite, les boucles locales radio, la 4G, et puis, pourquoi pas, d’autres solutions ».
Mais nous persistons à penser que l’État doit prendre toutes ses responsabilités en termes d’organisation de la filière et de planification de l’équipement du territoire. Cela signifie qu’il doit rester actionnaire déterminant dans le capital d’Orange et faire de l’opérateur historique le fer de lance de ce plan. Tout indique que ce sont la concurrence artificiellement entretenue entre opérateurs, l’affaiblissement programmé de ceux qui investissent et le pouvoir octroyé aux RIP qui aboutissent à l’immobilisme et au gaspillage, notamment des finances publiques. Ce n’est pas de carotte mais d’engagement dont nous avons besoin.

Fiscalité : la fin de la fête pour les GAFAM ?

Le Parlement européen a adopté un projet de directive qui oblige les grandes multinationales (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft…) à déclarer séparément les données fiscales et financières dans chacun des pays où elles opèrent. Le but est de s’attaquer à l’évasion fiscale qui s’élèverait de 50 à 70 Mds. Les entreprises ayant des activités dans l’UE et un chiffre d’affaires annuel d’au moins 750 millions d’euros devront divulguer des données telles que les bénéfices, les revenus, les taxes payées et le nombre d’employés pour chaque pays où elles opèrent au lieu de fournir un rapport consolidé. Pour FOCom c’est enfin une bonne nouvelle. Nous regrettons toutefois que les groupes libéraux du parlement aient réussi à ce que les entreprises puissent demander des exemptions à durée limitée pour les informations qualifiées de « commercialement sensibles », sans que la loi précise ce qui serait considéré comme « sensible ». Officiellement ce serait pour protéger la compétitivité de l’Europe. Comprenne qui pourra !

Drahi/Combes, le comble du cynisme

On le sait la stratégie de Patrick Drahi repose sur des acquisitions tous azimuts assises sur une dette pharaonique de 51 milliards d’euros : les télécoms, le câble, les medias, les acquisitions de droit sur le foot, la publicité, la production, le divertissement… tout est bon pour faire de l’argent avec l’argent des autres. En France, côté SFR, le bilan industriel et social est édifiant : un réseau et une qualité de service déplorables, des milliers de clients perdus depuis la reprise de SFR par Altice, des engagements non tenus, des suppressions d’emplois massives avec un nouveau plan de départs de 5000 personnes et un management d’une extrême brutalité. Mais ce n’est pas le souci de Monsieur Drahi. Aujourd’hui il entend essentiellement jouer en Amérique du Nord, 40% des marges du groupe provenant d’ores et déjà de ce continent. Et il ambitionne de porter la part des revenus américains d’Altice à 50% du total. Pour « toucher des liquidités et se doter d’une monnaie pour une consolidation future », il a réalisé le 22 juin la deuxième plus grosse introduction en Bourse de l’année aux Etats-Unis avec Altice USA, ce qui la valorise à près de 20 milliards d’euros.
Alors quand le directeur général du Groupe, Michel Combes, constate récemment que « sur l’Europe les opérateurs de télécoms nationaux sont dans une position de faiblesse » et qu’il lance un appel solennel en faveur de consolidations, il y a de quoi s’inquiéter. Si nous sommes convaincus de la nécessité de réduire le nombre d’opérateurs en Europe pour préserver leur avenir (et le nôtre), ce n’est évidemment pas sur le modèle économique et social développé par ces gens-là, ni avec eux…